7. Franchir l'Himalaya
2 autochenilles, Scarabé d'Or et Croissant d'Argent, seront préparées et allégées afin d'affronter les montagnes. Les autres resteront à Srinagar et attendront la confirmation que le groupe est passé avant d'être rapatriées en France.
L'expédition est scindée en trois groupes qui prendront la route à 10 jours d'intervalle :
- Le groupe 1 part le 1er Juillet. Il est dirigé par l'archéologue Hackin.
- Le groupe 2 part le 12 juillet avec Haardt, Ferracci, Morizet et le Dr Jourdan.
- Le groupe 3, dirigé par Audouin-Dubreuil, part le 20 juillet.
Tous vont vers l'inconnu et réalisent que tout retour
en arrière leur est impossible. La progression est lente, difficile.
Les chemins sont si étroits que deux chevaux peuvent à peine se croiser.
Ils empruntent des ponts en bois instables. Les autochenilles sont
attachées à des filins et sont lentement tirées de l'autre côte de la
rive. Certains sentiers sont si escarpés qu'il faut plusieurs heures
pour faire quelques centaines de mètres. les autochenilles sont arrimées car elles risquent à tout instant de basculer dans le vide.
Certaines photos devenues célèbres ont immortalisé ces moments vécus
par ces hommes comme des souffrances plus que comme des exploits.
Au Col de Burzil, le chemin est creusé à la pelle et à la pioche dans la neige. Les vivres commencent à manquer, l'argent servant à payer les porteurs aussi. La révolte gronde. Les membres de l'expédition doutent : de leur réussite, du sens de leur mission, de leurs forces. Pourtant, il n'y a pas d'autre choix que de continuer et d'affronter de nouveaux obstacles : une descente de plus de 1.000 mètres de dénivelé. Il faut 50 hommes pour retenir les autochenilles. Bientôt, ils arrivent devant une faille de 200 mètres de largeur. Impossible de faire passer les véhicules : ces derniers seront démontés en charges de 30 kilos.
Au bivouac, ils
branchent la TSF afin d'obtenir des nouvelles du groupe Chine. Ils
attendent...puis ils apprennent que le groupe est prisonnier du Maréchal King à Ouroumtsi. Ils continueront
leur route vers une jonction qui reste très incertaine.
Pendant ce temps, les meccanos restés à Srinagar sont rentrés en France. Ils apparaissent affaiblis et démoralisés.
Ce n'est rien à côté de ceux qui ont traversé l'Himalaya. Obligés d'abandonner finalement les autochenilles au Col de Gilgit, ils continueront à dos de cheval. ils doivent jour après jour chercher la force de continuer au fond d'eux-mêmes et sont exténués.
Ils passent au Col de Kilik, au croisement des 4 empires : Afghanistan, Russie, Inde et Chine. Devant eux, Le Sin-Kiang tant redouté. Ils arrivent à la première ville chinoise : Tach-Kourgan, perchée à plus de 3.000 mètres d'altitude. Tout se passe bien, et le 8 octobre, la jonction avec le groupe Chine, libéré entre temps par le Maréchal King, s'effectue dans la ville d'Aksou. Ils font la fête, reprennent des forces, mais les cicatrices à l'âme ne disparaîtront plus jamais...
8. Le Groupe Chine
Parti le 6 Avril de Pékin, il se trouva presque immédiatement immobilisé à cause d'une pièce mécanique défectueuse au niveau des chenilles. Javel envoya immédiatement de nouvelles pièces par le Transsibérien. Il faut à présent rattraper le temps perdu.
Une fois arrivés à Pei-Ling-Miao, ils découvrent que les savant censés les accompagner sont en fait là pour les surveiller. De vives tensions apparaissent. Les Chinois veulent tout contrôler : prélèvements d'échantillons, photos, fouilles...Lors de la traversée du désert de Gobi, ils deviennent très nerveux et agressifs. Le groupe s'égare plusieurs fois. Il est pris dans des tempêtes de sable, se retrouve en pénurie d'essence et de nourriture...Ils descendent vers le Sud et se retrouvent en pleine zone de combats pour se rendre à Sou-Tchéou. Ils traversent des champs de bataille jonchés de cadavres, et des villages ravagés par la guerre. A Hami, le prince leur délivre des sauf-conduits pour Tourfan. Les accompagnateurs chinois sont terrorisés à l'idée de croiser les révoltés Shantous et abandonnent l'expédition. Tourfan est irrespirable. Certains membre de l'expédition souffrent de dysenterie. Ils reprennent vite la route, traversent Ouroumtsi et retrouvent le groupe Pamir.
9. Retour vers Pékin
Tous les hommes sont exsangues, certains sont fiévreux. Ils repartent tous ensemble et trouvent la force de visiter les sites greco-boudiques de Kizil et Tchour-Tchouk.
Le 27 octobre, retour à Ouroumtsi. Il faut négocier avec le Gouverneur King les passeports collectifs pour pouvoir revenir à Pékin. Il fera perdre plusieurs semaines à l'expédition. il faudra se plier à ses désirs et caprices. Javel enverra par le transsibérien une autochenille et trois postes de TSF en cadeau afin de débloquer la situation.
Le 18
novembre, l'expédition atteint les sites de l'ancien royaume de Tourfan. Hackin, Teilhard de Chardin, Iacovleff, Le Fèvre, Williams et
Audouin-Dubreuil se mettent au travail. "Iaco" peint, sa palette est
posée sur un réchaud pour éviter que les couleurs ne gèlent. Il fait
-10°.
Il faudra parcourir encore 3.000 kilomètres de désert, de paysages dévastés et de misère pour atteindre Pékin. A cause des caprices de King, ils ont pris du retard et vont devoir affronter l'hiver. Il fait -28°. La TSF rend l'âme, l'eau des radiateurs gèle. Les moteurs des autochenilles tourneront désormais 24 heures sur 24. Les étapes sont longues, 400 à 500 kilomètres par jour. Parfois, les dépôts enterrés sur l'itinéraire sont retrouvés pillés.
A Sou-Tchéou, ils sont faits prisonniers puis rapidement libérés. Ils en seront quittes pour une bonne frayeur. Ils quittent la ville par la porte fortifiée à laquelle sont accrochés 27 têtes de bandits. Les corps gisent un peu plus loin...La route reprend. Ils traversent les Monts Nan-Chan. 5 kilomètres en une heure. Les pannes à répétition, le froid.
L'enfer existe sur terre. Ces hommes le côtoient désormais tous les jours.
Audouin-Dubreuil écrit : "Notre isolement est tragique. 10 heures de route, 10 heures de pannes, 2 heures de repas, 2 heures de sommeil. Pays maudit, de souffrances, d'inquiétudes et de terreur".
Ils arrivent après Noël sur la rive du Fleuve Jaune, gelé. La voiture d'Audouin s'enfonce soudain dans l'eau mélée de glace. Ils mettront 8 heures à la sortir de ce piège, et la traversée durera près de trois jours !
A Pa-Tsé-Bolong, l'expédition est attaquée par des soldats : on retrouvera 17 impacts de balles. Puis, c'est l'accalmie : ils arrivent sur le territoire des Mongols, le"Pays de l'Herbe". Ici, aucune agressivité, bien au contraire...Le 27 janvier, ils atteignent la steppe. ils visitent des lamaseries et croiseront même le Panchen-Lama. Le but approche. ils descendent vers la grande plaine chinoise. Les dangers sont écartés, mais le groupe ne retrouvera pas la sérénité pour autant.
Le 12 février 1932,
Pékin est enfin atteint !
Ils franchissent les murs de la Cité interdite. ils se trouvent totalement désorientés et égarés dans ce monde soudain assourdissant, eux qui ont vécu tant d'isolement et de silences inquiets. Ils arrivent à la Délégation Française et retrouvent les cérémonies officielles qu'ils avaient totalement oubliées. Le délégué du ministre de France, Lagarde, prononce un discours devant 500 invités.
A suivre...
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